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Après les révélations du magazine L’Incorrect mettant en cause les journalistes Patrick Cohen et Thomas Legrand, l’OJIM vous raconte les coulisses de la polémique qui secoue le paysage politico-médiatique et remet en cause l’impartialité du service public.

C’est un été qui s’annonce chargé pour le mensuel conservateur L’Incorrect. En parallèle de la préparation du hors-série consacré à L’art d’être français, la petite équipe travaille déjà au numéro de rentrée. Celui-ci marquera le lancement de leur nouvelle formule, résolument tournée vers la bataille culturelle. Au milieu de cette effervescence intellectuelle, les journalistes reçoivent entre leurs mains une véritable bombe : un lecteur du magazine leur adresse une série de vidéos, tournées le 7 juillet dans un bistrot du VIIᵉ arrondissement de Paris.

Celles-ci ne vous seront certainement pas inconnues : on y voit Thomas Legrand, éditorialiste politique sur les ondes de France Inter, et Patrick Cohen, chroniqueur sur cette même chaine ainsi que dans l’émission C à vous de France TV. Cela n’aurait rien de surprenant si ces derniers n’étaient pas attablés avec deux cadres du Parti socialiste, l’eurodéputé en charge de la stratégie électorale Pierre Jouvet et Luc Broussy, président du conseil national du PS. Sur les images, les quatre hommes semblent au cœur d’une discussion passionnée, ce qui attire l’attention d’un client à une table voisine. Reconnaissant les journalistes, il se décide à tendre l’oreille puis à immortaliser la scène, conscient de l’enjeu politique autour de ce repas.

À la rédaction, les journalistes de L’Incorrect restent prudents face au caractère sensible des vidéos qui leur sont parvenues. Si le décryptage de ces dernières s’avérait concluant, c’est la réputation du service public qui serait entachée. S’ensuit alors un long travail d’analyse et de vérification, afin de s’assurer de l’identité des protagonistes, ainsi que de leurs propos. Au fur et à mesure des écoutes, Juliette Briens prend conscience de l’importance des images qu’elle visionne, et particulièrement de ces mots de Thomas Legrand :

« Nous, on fait ce qu’il faut pour Dati, Patrick et moi ».

« Le problème, avec un Le Pen-Glucksmann, c’est que je ne sais pas ce que fait le centre-droit. Ils sont pas nombreux mais moi je pense qu’ils écoutent France Inter. Et ils écoutent… en masse ! », ajoute-t-il dans un second extrait. Comprendre : mettre en œuvre la tribune qui leur est offerte par les médias du service public pour disqualifier Rachida Dati de la course des municipales parisiennes et pousser la candidature présidentielle de Raphaël Glucksmann. « Lorsque j’entends cette phrase de manière extrêmement claire et limpide, j’ai pratiquement poussé un cri dans les bureaux : que quelqu’un me pince ! », raconte la directrice de la communication du magazine.

 

Le sens du timing

Pour la rédaction de L’Incorrect, ces extraits sont d’une importance cruciale pour dénoncer la mainmise idéologique des idées de gauche sur le service public. Préférant la prudence, Arthur de Watrigant, directeur de la rédaction, prend le temps de rédiger l’article qui explique les tenants et les aboutissants de cette entrevue, et choisit d’attendre le mois de septembre pour déclencher les hostilités. La rentrée politique 2025 est en effet très chargée, sur fond d’instabilité parlementaire et de crise liée à la dette. Il faut viser juste. L’information ne doit pas passer inaperçue, noyée dans l’actualité du vote de confiance demandé par François Bayrou pour le lundi 8 septembre, et la manifestation.

 

Bloquons tout

» prévue le 10. Ce sera donc le vendredi qui précède cette semaine cruciale que L’Incorrect choisira de publier l’article qui mettra le feu aux poudres.

Dans un premier temps, les réactions sont mitigées : sur X, les internautes doutent de la véracité des propos rapportés par le mensuel. C’est là que les journalistes jouent leur carte maîtresse : une première vidéo contenant la phrase choc de Thomas Legrand sort sur le compte X de Juliette Briens. Le retentissement est immédiat : les images font le tour du réseau social et les critiques à l’encontre du service public fusent déjà. En interne, les journalistes de L’Incorrect reçoivent des dizaines de messages, dont l’un attire leur attention. Il provient directement du cabinet de la ministre de la Culture, citée par Thomas Legrand : ils sont prévenus, Rachida Dati prépare déjà sa contre-attaque. Celle-ci ne se fait pas attendre, ses soutiens réagissant en nombre, à l’instar de la conseillère de Paris Aurélie Pirillo, qui qualifie l’échange de « scandaleux ».

 

Réactions en chaîne

Les responsables politiques ne tardent pas à s’emparer du sujet. Jean-Luc Mélenchon juge la séquence « consternante ». Jordan Bardella y voit une « preuve supplémentaire de la partialité du service public ». Quant à Marine Le Pen, elle profite de l’affaire pour réitérer son appel à la privatisation de France Télévisions et Radio France, estimant que « les Français ne doivent pas financer leur propre désinformation ». À droite comme à gauche, la polémique sert de levier pour critiquer l’audiovisuel public, déjà fragilisé par les débats récurrents sur son indépendance. La direction de Radio France suspend Thomas Legrand à titre conservatoire, le temps de faire la lumière sur l’affaire.

L’agenda du weekend de L’Incorrect est chargé : Arthur de Watrigant est reçu par Eliot Deval sur Cnews, avant de se rendre sur Europe 1, puis Radio Courtoisie lundi matin. Même itinéraire médiatique pour Juliette Briens. Le magazine rédige également un communiqué pour répondre aux tentatives de disqualification politique et médiatique. « Après la suspension de Thomas Legrand, quid de celle de Patrick Cohen ? », se questionne Arthur de Watrigant sur les ondes d’Europe 1. Derrière l’affaire Legrand-Cohen, c’est une fois encore la question de la confiance dans l’information qui se pose. Les journalistes du service public, financés par la redevance, sont soumis à une exigence d’exemplarité accrue. « Le service public n’est plus la voix de tous, mais le miroir d’une élite persuadée d’être universelle, alors qu’elle n’est qu’entre soi », écrit le journaliste de L’Incorrect Wandrille de Guerpel. Cette affaire révèle un paradoxe bien français : l’attente d’une information neutre et objective, quand les journalistes eux-mêmes sont inévitablement porteurs d’opinions. Et L’Incorrect, par ces quelques vidéos, aura suffi à faire trembler la citadelle de l’« impartialité » du service public.

Gersende Barrera - 9 septembre 2025 - Observatoire du journalisme (Ojim)

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