jacques de maheux franck buleux

 

Les Éditions PARDÈS poursuivent la publication de courtes (130 pages) biographies de personnalités, notamment littéraires. C’est parfois un travail ingrat, quand il s’agit d’évoquer des personnages dont les éléments biographiques traînent un peu partout. Nous sommes alors dans le domaine de la vulgarisation. Et il est surtout fait appel à l’esprit de synthèse.

Mais ce n’est pas le cas pour Jacques de Mahieu. Jusqu’à l’étude de Franck Buleux, il n’existait en effet aucune biographie de cet auteur, et son travail est donc forcément novateur, pour le coup. Mais Buleux reconnaît qu’il y a encore des lacunes dans la connaissance de cet universitaire, malgré ce « Qui suis-je ? ». L’essentiel des archives utiles se trouve peut-être encore en Argentine, où il a passé le plus gros de son existence ? De ce fait, cette biographie comporte encore des zones d’ombre, et son auteur est souvent contraint d’émettre des hypothèses, faute de certitudes. Voici quelques questions : pourquoi Mahieu prend-il ce nom (il s’appelait Jacques Girault) ? Pourquoi quitte-t-il la France ? Avait-il été membre de la Milice ou de la Waffen SS ? Pour partir en Argentine, a-t-il bénéficié de filières (Odessa, le Vatican, la CroixRouge ?). Comment est-il parvenu à s’imposer si vite en tant que spécialiste de géopolitique auprès des cadres de l’armée péroniste ? Et pourquoi, malgré sa disgrâce, à la suite de la destitution de Perón, le retrouve-t-on idéologue de ses successeurs ? Comment a-t-il réussi à accomplir sa prestigieuse carrière universitaire ? Quel était le poids réel des institutions qu’il présidait ou auxquelles il appartenait (Académie argentine de sociologie, université des sciences sociales, faculté des sciences politiques, Institut des sciences de l’homme) ? Certains de ses travaux universitaires appellent aussi des questions. Quelle crédibilité peut-on accorder à ses investigations archéologiques et anthropologiques, à ses études sur « les Indiens blancs », qui seraient les descendants des vrais découvreurs de l’Amérique, les Vikings, et sur l’origine scandinave supposée de la civilisation des Incas ? Ces hypothèses, ces travaux de recherche ont été l’objet de livres publiés sous le label du « réalisme fantastique » ou des « énigmes de l’univers ». On devine que son approche n’était pas vraiment universitaire. Son érudition était considérable, mais orientée vers une thèse unique, semble-t-il, celle qui voulait que Christophe Colomb n’ait été qu’un imposteur, et que l’Amérique ait été découverte et colonisée un demi-millénaire plus tôt. L’Argentine n’a pas de convention d’extradition Jacques Girault est issu d’une famille marseillaise, catholique et patriote.

 

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Né en 1915, il s’engage très jeune à l’Action française, milite aux Camelots du roi. Il écrit dans le quotidien de l’AF, et à L’Etudiant français, mensuel des étudiants royalistes, dont il va devenir le gérant. L’arrestation, puis la condamnation de Charles Maurras, en1945, le traumatisent, et c’est ce qui va le pousser à changer d’identité et à s’expatrier, d’abord en Suisse, puis en Belgique et enfin en Argentine. L’Argentine n’a pas de convention d’extradition avec la France et c’est probablement ce qui l’aura déterminé à choisir de s’installer définitivement dans ce dernier pays. Pourquoi ce changement d’identité ? Pourquoi cette fuite ? Son appartenance à l’Action française, ses articles dans la presse royaliste ne justifiaient aucune sanction, au-delà d’éventuels interdits professionnels. Il est incontestable, nous dit Buleux, qu’il a choisi de soutenir Vichy et même sa politique de collaboration. La trace du passage des « dieux blancs » Mais rien ne permet de penser qu’il aurait par exemple intégré la Milice. Buleux se contente d’écrire : « il ne peut pas être exclu qu’il ait rejoint la Milice », et cela « n’aurait rien de surprenant ». Mais rien n’est moins sûr non plus. Quant à la Waffen SS, pour le coup Buleux en doute fortement, car les dates paraissent exclure un tel engagement. Alors pourquoi part-il ? Peut-être, comme Mohrt ou Déon à la même époque, par rejet du nouvel ordre qui s’installe ? Il y a aussi des considérations plus personnelles, familiales. Son graal, ce sera alors la recherche de cette trace du passage des Vikings, des « dieux blancs », en Amérique. Il ne l’a pas trouvée. Mais il l’a approchée.

Franck Buleux, Jacques de Mahieu, éd. Pardès, coll. « Qui suis-je ? », mai 2021, 128 pages.

Source:  Francis Bergeron - Présent – Samedi 24 juillet 2021 - francis-bergeron@present.f

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