LE SYSTÈME CONTRE LES PEUPLES
LES PEUPLES CONTRE LE SYSTÈME

Le devoir de lucidité peut conduire, parfois, à un certain pessimisme, dans la mesure où il élimine des illusions inutiles, voire dangereuses. Mais ce doit toujours être un pessimisme actif. Autrement dit, avoir conscience des réalités ne doit pas empêcher de vouloir influer sur elles. Tout au contraire - et ce sens d'un destin qu'il faut vivre debout, sans esprit de renoncement, sans fatalisme est sans doute l'une des caractéristiques de la conception du monde européenne, depuis toujours. Un tel choix est d'autant plus nécessaire, aujourd'hui, que les événements nous apportent des raisons objectives d'espérer en la possibilité d'un autre horizon. Voyons un peu cela.

Nous sommes dans un monde en mutations, imprévisibles. Nous allons peut-être vers l'apparition de conséquences non seulement ne correspondant pas aux projets des apprentis-sorciers qui ont lancé la course de certains engrenages mais qui vont même s'avérer être tout le contraire. Ainsi la globalisation, destinée à éradiquer les identités, peut leur donner une nouvelle force d'affirmation, par réaction. Le monothéisme du marché et l'idéologie des droits de l'homme, proclamés incontournables par les libéraux, peuvent buter sur les réalités et provoquer des prises de conscience.

Alors que tout a été fait, depuis longtemps, pour modeler les opinions publiques en conformité avec les choix et les objectifs du Système, les effets de l'anesthésie d'origine médiatique semblent trouver leurs limites. Avec, parfois, des effets boomerang assez savoureux. Ainsi, comme le signale Polémia (www.polemia.com), le magazine américain Time a eu l'imprudence de proposer sur Internet un sondage pour déterminer quel pays, selon l'opinion publique, constitue la menace la plus grave pour la paix du monde. Trois choix étant possibles : la Corée du Nord, l'Irak et les USA. Les USA arrivent très largement en tête, avec 87,6 % des 600 000 réponses enregistrées en date du 28 février…

Le chiffre est à rapprocher des résultats obtenus par les instituts de sondages sur le positionnement des opinions publiques en ce qui concerne la guerre en Irak. Ils sont sans appel : 71 % des Allemands sont contre, 84 % des Belges, 91 % des Espagnols, 77 % des Français, 88 % des Grecs, 82 % des Hongrois, 68 % des Irlandais, 61 % des Italiens, 90 % des Norvégiens, 80 % des Hollandais, 72 % des Polonais, 65 % des Portugais, 57 % des Slovaques, 83 % des Suisses, 94 % des Turcs. Et, cerise sur le gâteau, 90 % des Britanniques (si la guerre est faite sans l'aval de l'ONU).

La conclusion est simple : les peuples sont contre le Système de domination et d'homogénéisation mondiales, incontrôlées et incontrôlables, que les USA veulent imposer à leur profit, par tous les moyens (on sait par exemple que le très influent Donald Rumsfeld, obsédé, pour des raisons personnelles, par sa volonté d'assurer la protection inconditionnelle d'Israël, a créé aux USA un Office d'Influence Stratégique chargé, comme l'avoue l'International Herald Tribune, "d'influencer les opinions publiques et les dirigeants politiques aussi bien dans les pays amis que dans les Etats ennemis"). Par leur prétention à régenter la planète, au nom d'un manichéisme de demeurés et sous couvert d'une bonne conscience qui a quelque chose d'obscène, d'abject, les Etats-Unis sont en train de dresser contre eux beaucoup de peuples. Y compris des peuples dont les dirigeants institutionnels se vautrent dans la servilité à l'égard des USA, pour obtenir de gros pourboires, comme ceux des pays d'Europe de l'Est, d'Italie, d'Espagne ou de Grande-Bretagne. Ces gens sont en train d'amasser sur leur tête de futurs orages dévastateurs. Le plus emblématique étant peut-être l'Espagnol Aznar, qui a été incapable de protéger les côtes atlantiques de son pays contre la marée noire mais qui brandit son sabre de bois au service de Washington. Pauvre type. Méprisable type. Détail important : Aznar est "de droite", comme le sont Berlusconi et l'ignoble Fini.

Un mot au sujet de la France. Chirac, comme Schröder, sont des hommes du Système. Mais qui, obsédés par leur avenir électoral, gouvernent les yeux fixés sur les chiffres des sondages. Ils appliquent, tant vis à vis des Français que des Allemands, le bon vieux principe : ".Je suis leur chef, donc je les suis…". Ceci étant, ils ne se rendent pas compte qu'ils ont lancé sur les rails une machine qui d'ores et déjà leur échappe : l'idée mobilisatrice - le mythe, au sens sorélien du mot - d'un axe Paris-Berlin. Ajoutons-y Moscou et nous voilà devant une promesse d'avenir pour une future Europe, dont la colonne vertébrale est forcément l'axe Paris-Berlin-Moscou.

En déclenchant la guerre contre l'Irak (ce qui sera certainement fait lorsque vous lirez ces lignes, écrites le 4 mars), les USA vont ouvrir la boîte de Pandore. Tant mieux. L'Histoire va distribuer de nouvelles donnes. Beaucoup de choses vont peut-être devenir possibles. Alors, comme le préconise un vieil adage latin, il faut croire et combattre.

P. VIAL

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