"Pourquoi je suis moyennement démocrate"
par Vladimir Volkoff
Editions du Rocher

En 21 courts chapitres ramassés, Vladimir Volkoff produit une réflexion très pertinente sur la question de la démocratie : son titre est en lui-même de nos jours une quasi provocation, comme il l’annonce d’ailleurs dans son chapitre VII, "la conception moderne de la démocratie repose sur une pétition de principe", citant d’ailleurs au passage Jean Madiran "La démocratie est bonne parce que le bien c’est la démocratie ; la démocratie est juste parce que le droit c’est la démocratie ; la démocratie est dans le sens du progrès parce que le progrès consiste  dans le développement de la démocratie." Et Volkoff ajoute : "Lumineux. Imparable."

 

Comment donc peut-on être aujourd’hui un adversaire de cette forme de régime ? Volkoff invoque tout d’abord sa liberté de pensée (I) ; puis met en doute la qualité des élites désignées par ce modèle de gouvernement (II) ; en III, il invoque les particularités des populations concernées, leur capacité à se gouverner elles-mêmes, dont Taine, Saint Augustin et Saint Thomas savent tout trois qu’elles sont fort inégalement prodiguées parmi les peuples ; Volkoff montre ensuite que la loi démocratique, 50% des voix + 1, ne construit que des majorités de rencontre, instables par définition, et conduit à l’écrasement des minorités ; d’autant que les majorités sont façonnées, influencées par des minorités actives ; qui font de la démocratie un absolu : « Aujourd’hui, une phrase comme Au nom des Droits de l’Homme s’entend à peu près comme Au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit » (VIII); que la démocratie repose sur des bases irréalistes : « que l’homme ait des droits dans l’absolu, qu’il se garantit lui-même à lui-même par le moyen de déclarations périodiques, nationales ou internationales, et d’ordinaire peu suivies d’effets, m’apparaît – pardon de vous choquer [de rien !]- comme un gigantesque canular. » Le proverbe vox populi, vox dei, supposerait que la démocratie soit constamment inspirée par Dieu, ou que Dieu lui-même est le peuple, ce qui est paradoxal, et dans les deux cas assez inquiétant : « dans la première hypothèse, on fait voile sur Utopie. Dans la seconde, on est parti pour Sodome. » (X). La démocratie conduit au totalitarisme, selon Volkoff, par sa prétention à se définir comme un absolu, alors que « Racine écrivait que Dieu seul est absolu » (XI). Elle repose ensuite sur le principe de l’égalité absolue des hommes : « René Guénon écrivait que le fond même de l’idée démocratique, c’est qu’un individu quelconque en vaut un autre, parce qu’ils sont égaux numériquement, et bien qu’ils ne puissent jamais l’être que numériquement ». Ce principe n’a pas de fondement, car il ne saurait y avoir d’égalité en qualité (XII). Et d’ailleurs, « la nature humaine étant souvent plus portée à l’envie qu’à la générosité, ce sont généralement les classes les moins favorisées qui recherchent la démocratie, dans l’espoir d’atténuer les différences qui les séparent des classes dites supérieures, tandis que les classes dites supérieures, n’ayant qu’à y perdre, s’efforcent aussi longtemps que possible de préserver le statu quo », cette lutte à base de ressentiment risque fort de nuire à la collectivité dans son ensemble (XIII). L’installation de la démocratie s’accompagne souvent de massacres : « le chemin est court de l’Encyclopédie à la Terreur" (XIV). La démocratie est contre nature, car « l’apparition d’une aristocratie- que ce soit celle du talent, du mérite, de l’élection, de la volonté de puissance, de la richesse, de l’hérédité réelle ou supposée- est un phénomène naturel » (XV). La démocratie est en outre l’ennemie de la beauté : « voyez la France à qui l’Ancien Régime a légué la place Vendôme et le Nouveau Beaubourg » (XVI). La démocratie est toujours imparfaite, car elle est tempérée d’esprit aristocratique quand elle fonctionne bien (aux Etats-Unis), et précipite le pays qui la subit dans la régression quand elle s’applique étroitement (voir le cas de la France). Elle est de plus en plus proche des totalitarismes, étant donné le développement de la pensée unique dans les médias (XVIII). Les autres régimes peuvent donc être défendus, avec un peu d’indépendance d’esprit (XIX). Enfin, « comme système de gouvernement, la démocratie se bafoue elle-même à chaque instant, par les nombreuses tricheries qu’organisent ses chefs (…) elle n’est souvent qu’un simulacre de démocratie».
Les idées présentées par Volkoff ne sont pas toutes originales, ni très nouvelles, - il cite d’ailleurs des auteurs aussi divers que Rousseau ou Gandhi, Racine ou Burke, mais aussi le Coran et la Bible; mais on sent que c’est la maturité de notre auteur qui lui a permis au bout d’un long parcours, de les réunir en un traité court et lumineux. Ce petit ouvrage à la fois léger et profond peut jouer au quotidien le rôle d’un usuel fort précieux, un contrepoison pour supporter notre triste époque.
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