Depuis le 7 octobre 2023, les lieux de l’attaque du Hamas sont devenus de véritables attractions touristiques : des visites guidées sont organisées par des agences de voyages et des hôtels pour les curieux du monde occidental, États-Unis, Canada et Europe en tête. Au-delà de l’angélisme vendu par ces tour-opérateurs qui les ont baptisées « tournées de solidarité » et vantent un « tourisme engagé », cette transformation de la souffrance et de la mort en une expérience commerciale lucrative interpelle.
Ne le cherchez plus sur Trip Advisor, le tour intitulé « 7 octobre – Visite du patrimoine et de l’héroïsme à la frontière de Gaza » n’est plus disponible sur la célèbre plateforme de réservation. Cette « visite unique d’un jour qui vous permettra de voir par vous-même et de vous rappeler les événements et les horreurs du 7 octobre à la frontière de Gaza« , après avoir créé l’émoi a simplement changé de nom. Il faut désormais rechercher à l’intérieur de voyages organisés aux noms plus neutres, tels Israel Wine Tour ou se rendre directement dans quelques-uns des hôtels de la région qui proposent les visites, pour pouvoir participer à ces tournées de l’horreur.
Mais le phénomène va bon train, comme en témoigne Maya Rosen. La rédactrice adjoint de Jewish Current.org, difficilement accusable d’antisémitisme, a pu observer des douzaines de cars touristiques sur les parkings des sites dévastés. Des cars qui patientent pendant que les voyageurs en mal de sensation se promènent au milieu des débris des kibboutzim attaqués, posent dans les maisons criblées de balles, font des selfies sur le lieu de la rave party et scannent les QR code des carcasses de voitures calcinées ou accidentées, narrant le drame vécu par ses passagers.Et achètent parfois des petits souvenirs, possibilité offerte aux visiteurs.
Petit hic au tableau : les kibboutzim les plus macabres, ceux où ont été commis les pires atrocités, sont réservés aux visites guidées des dignitaires ou des célébrités. Les touristes déçus pourront toujours se rabattre sur la guerre et choisir d’inclure dans le forfait une excursion sur la colline de Sderot : les plus chanceux assisteront à quelques bombardements su Gaza en direct, loin de la poussière et du sang.
Le prix de la journée varie entre 150 et 800 dollars et à ce jour, plusieurs dizaines de milliers de d’Américains ont déjà pris part à ces voyages. Les organisateurs espèrent qu’ils encourageront les Juifs de la diaspora à se rassembler autour d’Israël dans un moment d’opprobre international croissant. Selon Maya Rosen, ils visent « à réinscrire chez les Juifs américains le sentiment de victimisation ». Et ajoute : « les groupes disparates derrière ces missions semblent partager la croyance que montrer aux Juifs de la diaspora les cicatrices du 7 octobre est essentiel pour renforcer leur soutien à l’assaut meurtrier d’Israël sur Gaza. »
Monétiser l’horreur en déviant les regards de la riposte disproportionnée de Tel Aviv sur ses voisins ; spectaculariser la guerre en pérennisant le statut de victime d’Israël, le tout en générant du profit… une « privatisation » de la mort décidément très peu éthique.
Audrey D’Aguanno
Illustrations : DR
Source : Breizh-info.com - 27/06/2025