Trop longtemps ignoré dans sa Bretagne natale, le nom de l’artiste Jeanne Malivel a progressivement refait surface depuis quelque temps. En cette année 2023, marquant le centenaire du mouvement artistique Ar Seiz Breur (Les Sept Frères, en breton), une exposition parisienne est consacrée à son œuvre.
Jeanne Malivel, « artiste engagée » exposée à Paris
C’était en 1923. À l’époque, une poignée d’artistes bretons parmi lesquels figuraient Jeanne Malivel, René-Yves Creston et son épouse, lassés des « biniouseries » (qui séduisent encore aujourd’hui une partie de la population acculturée), ambitionnèrent de donner à la Bretagne l’art national, à la fois moderne et enraciné, qu’elle méritait. Ainsi commençait l’aventure des Seiz Breur qui devait se poursuivre jusqu’en 1947.
100 ans plus tard, aucun mouvement artistique breton n’a depuis été en mesure de surpasser celui de cet art déco de l’entre-deux-guerres. Et Jeanne Malivel est toujours d’actualité ! Spécialisée dans les arts décoratifs et les métiers d’art, la bibliothèque Forney, située dans le quatrième arrondissement de Paris, propose à ses visiteurs de découvrir, depuis le 8 mars, une exposition intitulée« Jeanne Malivel, une artiste engagée ».
Bibliothèque Forney, Paris. Source : pariszigzag.fr
Cette dernière, visible jusqu’au 1er juillet 2023, est présentée comme suit par la bibliothèque parisienne : « Jeanne Malivel, pionnière de l’art moderne breton, a créé en l’espace de dix années seulement une œuvre impressionnante : peinture, gravure, mobilier, céramique, vitrail, textile… Son engagement en faveur du renouveau des arts décoratifs est méconnu, alors qu’elle est à l’origine de la création du groupe Ar Seiz Breur (les Sept Frères), qui représente la naissance du mouvement Art Déco en Bretagne. L’exposition, qui réunit plus de 250 de ses œuvres, propose de redécouvrir cette artiste audacieuse ».
Des œuvres prêtées par la famille de Jeanne Malivel, ainsi que par les musées de Quimper, Saint-Brieuc et Rennes.
Par ailleurs, dans le cadre de cette exposition, une conférence sera donnée par Olivier Levasseur le 19 avril à la bibliothèque Forney 19 h 30 à 21 h sur le parcours de Jeanne Malivel ainsi que sur la genèse du mouvement Ar Seiz Breur. Le conférencier, historien de l’art, est auteur de l’ouvrage « Jeanne Malivel, la geste engagée d’une artiste bretonne » aux éditions Locus Solus.
Une étoile filante de l’art moderne breton
Artiste prometteuse fauchée en pleine ascension à 31 ans par la maladie, Jeanne Malivel (1895-1926), de Loudéac, aura toutefois laissé derrière elle une œuvre prolifique au patrimoine breton en tant que peintre, illustratrice et graveuse.
Après une enfance passée dans le Centre-Bretagne, Jeanne Malivel part à Paris pour ses études mais la guerre de 1914 l’oblige à revenir dans sa ville natale où elle sera infirmière bénévole dans un hôpital auxiliaire. Elle repassera le concours d’entrée aux Beaux-Arts de Paris en 1918 avec brio (classée 4ème).
Jeanne Malivel. Source : Mairie de Paris
Une fois la guerre terminée, Jeanne Malivel reprend donc de plus belles ses activités de création dans son atelier de Montparnasse. Essayant de se faire tant bien que mal à la vie parisienne, elle se rend vite à l’évidence : sa place est en Bretagne et elle décide d’y rentrer en 1920. C’est la grande époque du style Art Déco et Jeanne Malivel a une ambition bien précise. Elle souhaite sortir du folklore réducteur l’art populaire breton et, par ses créations, donner ainsi du travail aux femmes de Bretagne en développant les artisanats locaux. Jeanne Malivel appliquera donc, dès 1920, le Vivre et travailler au pays souvent prôné mais rarement mis en œuvre, encore aujourd’hui.
Source : paris.fr
Revenue à Loudéac, elle rencontre en 1923 René-Yves Creston, Suzanne Candré et Georges Robin. Ce serait lors du pardon du Folgoët, en septembre de la même année, que l’idée de fonder Ar Seiz Breur (Les Sept Frères, en breton) aurait pris naissance. Un nom en référence aux sept saints fondateurs de la Bretagne. Dans les années suivantes, le cercle des Seiz Breur s’agrandira et comptera dans ses rangs des artistes et des artisans qui souhaitaient mettre leur art au service du quotidien en créant des meubles, des tissus muraux ou encore des faïences. Le tout, en reprenant les fondements de l’art breton et celtique.
La carrière de Jeanne Malivel, bien que prolifique, sera extrêmement courte. Nous lui devons notamment les illustrations du livre Histoire de Notre Bretagne écrit par Jeanne Coroller-Danio en 1922. Un livre dans lequel son Nominoë triomphant deviendra pas la suite un classique de l’imagerie nationaliste bretonne.
Le roi breton Nominoë par Jeanne Malivel. Source : amis-musee-faience-quimper.fr
Informations pratiques :
Exposition Jeanne Malivel, une artiste engagée
Du 8 mars au 1er juillet 2023
Bibliothèque Forney, 1, rue du Figuier, Paris 4e.
Du mardi au samedi, de 13 h à19 h. Visite commentée chaque samedi à 15 h.
Entrée libre.
Source : Breizh-info.com - 13 mars 2023