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Vue des thermes et du praefurnium depuis le sud-est - Ch. Fouquin, Inrap

 

Des fouilles préventives menées par l’INRAP près d’Auxerre ont révélé la présence d’une villa gallo-romaine très vaste habitée entre le Ier et le IVe siècles. On plonge dans ce chantier et ce passé où résonnent les eaux d’un bassin, d’une fontaine et de thermes.

Avec

  • Alexandre Burgevin, archéologue, chargé d’opération et de recherche INRAP au sein de l’Unité mixte de recherche Chrono environnement de l’Université Marie et Louis Pasteur de Besançon

Un site connu depuis le XIXe siècle

A trois kilomètres au sud d’Auxerre sur la rive droite de l’Yonne au lieu-dit Sainte-Nitasse dormait depuis des siècles une villa gallo-romaine de très grande envergure. Si le site est connu pour son potentiel archéologique depuis le XIXe siècle, il a fallu attendre la création d’une gravière en 1966 pour que soient réalisées les premières fouilles.

Après un décapage de 2.400 m² apparaît alors un bâtiment rectangulaire de 700 m² comportant une dizaine de pièces dont une à abside. Quelques objets retrouvés attestent d’une occupation entre le Ier et le IVe siècles.

Des fouilles préventives et une découverte majuscule : un « petit Pompéi » à deux pas d’Auxerre ?

En 1976, cette prairie humide inoccupée pendant des siècles est reconvertie en aire de gens du voyage. L’aire est fermée en 2013 et abandonnée jusqu’à aujourd’hui. Les fouilles préventives conduites par l’INRAP sur une surface d’1,6 hectare interviennent dans le cadre de la construction du futur contournement routier de l’agglomération.

Elles révèlent un édifice gallo-romain immense de 4.000 m² : la partie dévoilée correspondant à la pars urbana, autrement dit la zone résidentielle de cette villa, l’autre partie dédiée à l’agriculture, la pars rustica restant encore largement à délimiter, même si quelques aménagements de cette dernière ont été mis au jour.

 

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Vue générale du chantier depuis l’ouest - Ch. Fouquin, Inrap

 

Le bâtiment est entouré à l’ouest, au nord et à l’est d’un mur d’enceinte. Il s’articule autour d’un jardin carré de plus de 450 m² de côté, fermé par un bassin quadrangulaire au nord et par une petite fontaine au sud. Cet espace est entouré par des galeries qui desservent des pièces de réception, des espaces techniques et peut-être une cuisine. Les thermes, eux aussi rattachés à l’habitation, sont situés dans l’aile orientale. Fait marquant, la terre de la zone n’ayant pas été retournée par des engins agricoles, on retrouve sur le site des vestiges de murs plus hauts que d’habitude.

 

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Vue de l’hypocauste et du sol des thermes de la villa, depuis l’est - Ch. Fouquin, Inrap

 

Les premiers résultats suggèrent l’existence de deux phases de construction, mais il est possible qu’il y en ait en réalité trois, marquant les différentes étapes de l’histoire de cet établissement rural. Les recherches à venir permettront de déterminer si son évolution est liée à celle d’Autessiodurum (l’actuelle Auxerre), qui passe d’une agglomération secondaire au début du Ier siècle à une capitale de cité au IVe siècle. Si l’ampleur des constructions laisse entrevoir le mode de vie particulièrement aisé des occupants, l’étude des vestiges de leur quotidien reste indispensable pour mieux les comprendre.

 

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Vue de l’aile nord de la villa en cours de fouille, depuis le nord-ouest - Ch. Fouquin, Inrap

 

Une villa, des villae : un exemple type d’architecture

Les grandes villae de la Gaule romaine se distinguent par leur vaste étendue, couvrant souvent plusieurs hectares, ainsi que par le développement notable de leur partie résidentielle (pars urbana), comme c’est le cas ici. Elles se caractérisent presque systématiquement par la présence de bains privés, souvent de grande taille, situés en lien direct ou à proximité immédiate de l’espace résidentiel. L’architecture y est généralement raffinée, faisant appel à des matériaux luxueux tels que le marbre, les mosaïques ou les fresques. Ces demeures incluent également des aménagements spécifiques : bassins, fontaines, jardins parfois organisés autour de plusieurs cours, ainsi que de petits sanctuaires domestiques. Ces villae constituaient le centre de vastes domaines appartenant à de riches propriétaires terriens, sans doute membres de l’élite politique des cités antiques. Il est rare que la pars urbana de ces établissements soit explorée aussi largement que dans le cas présent.

 

Un bâtiment médiéval accolé à la villa

Autre surprise lors de ces fouilles préventives, la découverte de murs d’un édifice médiéval datant du XIIIe siècle et dont les fonctions restent encore à définir. Les fouilles à venir nous aideront à mieux comprendre pourquoi cet édifice a été installé à cet endroit-là et en bordure du site de l’ancienne villa gallo-romaine.

Provenant du podcast L'Entretien archéologique - France Culture - 13 juin 2025

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