Catégorie : LES EVEILLEURS DE PEUPLES
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Le libéral est toujours prêt à abandonner son point de vue pour en prendre un autre, aussitôt que la situation générale et des considérations utilitaires l'y invitent. Il lui suffit de trouver une formule susceptible de légitimer ce changement de point de vue.

Le réactionnaire a un point de vue absolu auquel il se tient avec rigidité. Chez lui, le caractère devient de l'obstination, la vie se fige en un État ; tout s'engourdit autour de lui et en lui.

Le révolutionnaire a un point de vue chaotique qui l'emporte en tourbillonnant et l'entraîne à des perspectives sans espoir. Il n'a pas de caractère, mais un tempérament qui le fait osciller de la colère la plus impétueuse à la froideur la plus glaciale et la plus cynique.

Le conservateur a un point de vue organique. La pensée conservatrice est une pensée démiurgique qui oblige l'homme doué de force créatrice à poursuivre l'œuvre du créateur et qui, en tant que pensée politique, se rapporte à la communauté des peuples.

C'est de ce pouvoir conservateur des choses, qui règle toute croissance, qu'est issu l'éternel dont parle la métaphysique allemande ; et, si nous jetons sur l'histoire un coup d'œil rétrospectif, nous le découvrons partout, où de grands hommes ont créé, selon les lois immuables la nature, et nous ont transmis des valeurs. Tous les grands hommes ont été conservateurs et ont affirmé pour la vie ce que Nietzsche affirmait, pour lui-même : « En fin de compte, je ne veux pas avoir gain de cause pour aujourd'hui ni demain, mais pour des siècles. » La pensée conservatrice est un macrocosme qui englobe le microcosme et, en tant que pensée politique, garantit le maintient de la vie. La pensée conservatrice ne croit pas « au progrès », mais elle cherche à donner à l'instant une durée.

Le réactionnaire ne crée pas. Le révolutionnaire ne fait que de détruire ou, médiateur de buts, qu'il ne connaît pas lui-même, il ne fait, tout au plus, que de créer un espace nouveau. Le conservateur, lui, crée dans l'espace éternel, il donne aux phénomènes une forme, sous laquelle ils peuvent survivre et conserve par l'assujettissement ce qui peut se perdre dans le monde.

La pensée conservatrice est la conscience que prend de lui-même le fait fondamental et conservateur sur lequel repose le monde.

Elle est la force qui permet l’action.

Comme le révolutionnaire, le réactionnaire ne voit dans la révolution qu'un événement politique.

Le conservateur au contraire, qui voit l'événement historique, reconnaît derrière la révolution l'évènement spirituel qui l'accompagne, qui en est la transposition ou l'origine, et ceci quand bien même l'esprit de la révolution aurait été, d'abord, des plus équivoques.

La pensée d'un peuple résulte de la somme des expériences qu'il a faites avec d'autres peuples et de celles qu'il fait avec lui-même. La révolution a été pour le peuple allemand avec sa propre race une expérience qui lui manquait encore pour arriver à la connaissance de soi-même et à la connaissance du monde. Le réactionnaire dit : cette expérience n'était pas nécessaire. Le conservateur est d'un avis différent et il dit : Sans doute devons-nous réprouver, sur l'instant, la révolution du point de vue politique à cause des événements qui ont été en liaison avec elle mais nous sommes obligés de l'approuver historiquement, et ceci non pour elle-même, mais pour ses conséquences.

Le conservateur vit dans la conscience de l'éternité qui renferme tout le temporel. Mais il voit le présent ouvert du côté de l'avenir.

Il sait que le monde historique dans lequel nous vivons est un monde soumis à des lois et qui se réforme toujours. Il tient compté des instincts immuables des hommes qui se retrouvent dans tous les peuples, de l'invariabilité de leurs passions et du droit, tout naturel qui, en tout temps, fera valoir la force ; il tient compte des rapports naturels entre les forts et les faibles, de la supériorité de l'individu, des revendications de puissance des masses, et de toutes ses conséquences que le courage ou l'abandon, la circonspection ou l'étourderie, la résolution ou le laisser aller ont dans une situation historique. Mais il sait aussi que toute situation dépend de circonstances qui, quelquefois, peuvent sembler insensées mais qui ne le sont jamais. Et il n'ignore pas, non plus, que le sens de tous les événements n'apparaît que dans leurs conséquences. L'Allemand le plus conservateur a prononcé après la révolution les mots suivants, les moins réactionnaires qui soient : « Qui sait à quoi cela est bon? » C'est sur ces conséquences que le conservateur met un accent métapolitique. Et sa foi en l'imprévisible l'empêche de croire en des calculs sur l'avenir.

Le réactionnaire est une forme dégénérée du conservateur. Le réactionnaire est rationaliste. Il s'en tient aux faits. Il ne connaît que les effets qui sont immédiats. Ainsi il s'en tient aux faits de la révolution. Il ne se soucie pas de ses causes. Elles échappent à son regard du fait même qu'il est lui-même une de ces causes, non point en tant que personne, mais en tant que type. Il n'a plus compris l'idée conservatrice d'une façon vivante et de l'intérieur. Et à sa place, il laissa s'épanouir, une pensée conventionnelle, à une époque où il n'y avait pas encore de révolution. C'est ainsi, indirectement et sans le vouloir, par maintes négligences spirituelles qui ont conduit à la négligence politique, qu'il a aidé à préparer des événements dont il n'a pu, ensuite empêcher l'explosion révolutionnaire. Cette révolution, il ne l'a pas encore comprise maintenant. Il ne l'a pas vécue. Il n'a fait que la récuser. Dans le meilleur des cas, il avoue qu'elle lui a été un enseignement. Mais là encore il ne fait que juger des faits au lieu de comprendre leur signification. II ne peut prendre position, face à la révolution, parce qu'il vit en marge d'elle. Le conservateur, au contraire, connaît les problèmes qu'elle pose. Il connaît son époque, et cette connaissance qui lui rend, immédiatement, ces problèmes familiers. Et il a une image du monde, où tous ces problèmes s'insèrent, dans leur importance ou leur insignifiance. Le conservateur vit ainsi dans une participation à la révolution qui, contrairement au réactionnaire, lui donne le droit de ne pas être pour elle, mais contre elle.

Chaque peuple accomplit selon sa propre manière sa révolution : un peuple politique le fait d'une façon politique, un peuple non politique d'une façon non politique, et nous avons vu de quelle façon l’a faite le peuple allemand. Mais les peuples changent, du fait de leurs révolutions. Aucun peuple n'accomplit la sienne, sans se transformer. La révolution provoque un bouleversement des forces. Elle dégage ce qui restait stagnant. Elle met fin à des habitudes et amène les hommes à penser, de nouveau, à l'inaccoutumé. Elle en fait les représentants d'un nouvel état d'esprit d'où peut sortir un nouvel âge de l'histoire.

La conception que le réactionnaire a de l'histoire est aussi superficielle que celle du conservateur est enracinée. Le réactionnaire se représente le monde tel qu'il l'a toujours été. Le conservateur le voit comme il sera toujours. Il a l'expérience de son époque. Et il a l'expérience de l'éternité. Ce qui était ne sera jamais plus. Mais ce qui est toujours peut toujours revenir à la surface.

La politique réactionnaire n'est pas une politique. La politique conservatrice est la grande politique. La politique ne devient grande que lorsqu'elle crée de l'histoire : alors elle ne saurait se perdre.

Est réactionnaire, qui confond l’une et l'autre et voudrait revenir sur le passé.

Sources: Le Troisième Reich. Traduction de Jean-Louis Lenault. Ed. Alexis REDIER.

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