Notre fête de Noël



C'est la nuit la plus longue, et le jour le plus court. C'est la promesse du renouveau. C'est la fête des clans et des lignées. C'est Noël, avec ses coutumes, ses croyances. Ses souvenirs. Sa beauté. Par opposition à ceux du solstice de juin, les rites du solstice d'hiver – l'antique Jul/Joël, dont Noël est l'«héritier» - se célèbrent surtout au sein de la famille. Mais ce mot peut s'entendre au sens large. Il y a aussi des familles spirituelles.

Dans cette fête surgie du fond des âges, spontanée, presque instinctive, ou le cœur de l'homme redevient comme celui d'un enfant, comme s'il voulait, lui aussi, mourir et renaître d'un coup, nous voulons voir une fête de notre famille de pensée. C'est le moment ou tout s'arrête. La nature semble reprendre son souffle, et l'on ne sait si le soleil brillera de nouveau. C'est la fête de l'espoir, mais aussi de l'inquiétude. Rassemblés autour du feu, les hommes communient avec cette nature qui se repose en vue d'un nouveau départ. Ils cherchent, eux aussi, à faire retour sur eux-mêmes - avant un nouvel élan.

Mais c'est aussi la fête de ce qui recommence. Ce n'est pas un hasard si, à Rome, le visage bifrons du dieu Janus ouvrait et fermait les années. Les saisons qui s'enchaînent aux saisons, comme les générations aux générations, sont un symbole de l'Eternel Retour. Noël apporte la certitude que ce qui fut sera, que ce qui a été reviendra, que le passé n'est que la mémoire du futur, que la roue du temps, en tous sens, tourne éternellement. Ainsi, en cette période de l'année, toutes les dimensions du temps se trouvent associées. Les mêmes événements sont à la fois des souvenirs et des prémonitions. Retour Eternel qui permet de «prévoir» ce qui eut lieu, et de se «souvenir» de ce qui viendra. Retour, mais non répétition. Car,  c'est toujours le même soleil, et c'est toujours un autre soleil. Le passé ne se reproduit pas. Mais il revient dans les exemples qu'il nous donne.




 
Les idées pures sont grises et inutiles. Une idée n'est vraie, ne devient vraie que lorsqu'elle est vécue. Nous ne sommes pas de ceux qui négligent les fêtes, et qui ne célèbrent aucun rite. Mais au contraire, nous intégrons la fête à la vie quotidienne. Nous lui redonnons son sens véritable, celui d'une communion entre membres d'un même peuple, d'une nostalgie du merveilleux, d'une épiphanie de la beauté. Un Noël de l'âme.

Enfin, Noël est la fête de ce qui ne meurt pas. Non de ce qui vit, mais de ce qui survit. Dans la nuit, la nature peut sembler morte, et tout paraître sans vie. Mais la nuit à son secret, elle a sa vérité. Sous le gel, la vie s'apprête à renaître, plus forte encore des épreuves qu'elle a endurées. Et l'hiver n'annonce pas seulement un printemps, mais des milliers et des milliers de printemps qui viendront.

Nous ne sommes pas aujourd'hui à l'une des pages lumineuses de notre histoire. Nous vivons l'hiver de la pensée, plus que le printemps du renouveau. Mais nous pouvons être, au cœur de l'hiver, à l'image de ce par quoi le printemps revient. Nous pouvons être le gage de ce qui revient. Nous pouvons transformer l'espoir en certitude. Car l'espoir n'est rien d'autre que la confiance lorsqu'une fois encore, elle renaît de la volonté.
Voici Noël. Le soleil reviendra.

Robert de HERTE


 
Sources : éléments n°19 – décembre 1976 / janvier 1977.
 
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